Allaitement et alimentation

Allaitement et alcool : l’équilibre avant tout 

Tout ce qu’il faut savoir pour profiter des occasions sans risques 


Peut-on concilier allaitement et alcool ? Bonne nouvelle : c’est tout à fait envisageable, à condition de respecter des règles précises. Vous pourrez alors apprécier un verre de temps en temps, sans compromettre votre rôle de maman allaitante. Tout est une question de compréhension des mécanismes de l’alcool, d’équilibre et d’organisation pour concilier plaisir et sérénité. Dans cet article, vous trouverez quelques repères à connaître pour vivre votre allaitement avec liberté et sérénité. 


Comment l’alcool se transmet au lait maternel : mécanismes et durée d’élimination 

L’alcool passe-t-il dans le lait maternel ? La réponse est oui. Ne paniquez pas, il passe mais si c’est de manière occasionnelle, il ne représente pas de risques. On vous explique. 


Lorsque vous buvez une boisson alcoolisée, le transfert est direct du sang au lait maternel, et le taux d’alcool sera quasiment identique. Tout comme le sang, le lait maternel se filtre continuellement. Ainsi, le taux d’alcool dans le lait maternel descend simultanément à celui du sang de la mère


De manière générale, la concentration en alcool dans le lait maternel intervient 30 à 60 minutes après avoir bu le verre (90 minutes s’il est consommé avec un repas) et met environ deux à trois heures à être éliminée. Mais d’autres facteurs interviennent dans la durée d’élimination de l’alcool dans le lait maternel (et donc dans le sang) : votre poids, la quantité d’alcool consommée, le type d’alcool consommé, la vitesse de consommation, si l’estomac est vide ou plein. 


Par exemple, une femme de 59 kg qui boit 2 verres d’alcool (vin ou bière), doit attendre 4h49 avant que l’alcool ait totalement disparu du lait maternel, alors qu’une femme de 79 kg, devra patienter 4h07. Voici un tableau qui vous permettra de vous repérer facilement : 


Une consommation régulière ou importante d’alcool pourrait compliquer l’allaitement, en influençant des processus importants comme la montée de lait. L’alcool inhibe la sécrétion d’ocytocine, l’hormone indispensable à l’éjection du lait. Cela peut réduire la quantité de lait disponible pour le bébé et perturber l’allaitement à la demande. Ce phénomène peut être problématique, surtout dans les premières semaines où l’établissement d’une lactation suffisante est essentiel.


Cependant, relativisons : une consommation occasionnelle et modérée d’alcool ne nuit pas forcément à l’allaitement. Le tout est de savoir gérer le timing et la quantité pour limiter les risques d’exposition pour votre bébé, dont nous parlerons davantage dans le chapitre suivant. En synthèse : 

 

- L’alcool passe directement du sang au lait maternel.

- Le pic de concentration se situe entre 30 et 60 minutes après consommation.

- La durée d’élimination dépend de votre poids, de la quantité consommée et si vous avez mangé.

- En moyenne, il faut attendre 2 à 3 heures par verre d’alcool avant d’allaiter (pour une information plus précise, référez-vous au tableau plus haut dans cet article).


Allaitement et alcool : quels sont les risques pour le bébé ? 


Bien que l’on mette souvent en garde contre la consommation d’alcool pendant la grossesse en raison de ses effets néfastes sur le développement du fœtus, les impacts de l’alcool pendant l’allaitement ont été moins étudiés. Si certaines recherches se sont intéressées aux conséquences de l’alcool sur la lactation et le bien-être du nourrisson, les effets à long terme restent encore peu documentés. Les recommandations sur le sujet varient selon les organismes de santé :

 - L’OMS recommande de privilégier l’abstinence durant l’allaitement. 

- L’Academy of Breastfeeding Medicine indique qu’une consommation modérée (1 à 2 verres occasionnellement) peut être compatible avec l’allaitement si certaines précautions sont prises. 

- Le Centeres for Disease Contrôle and Prevention préconise d’attendre 2 à 3 heures par verre consommé avant d’allaiter.


Il semblerait tout de même que l’alcool, consommé de manière excessive et quotidienne, entraîne chez le bébé des effets indésirables suivants : somnolence accrue, sommeil inhabituellement profond, faiblesse musculaire, faible prise de poids, retard de développement moteur et des capacités cognitives.

Même une consommation modérée (ponctuelle mais dans l’excès) peut avoir un impact sur la production de lait et sur l’éjection du lait, et certains effets secondaires peuvent être observés chez l’enfant :


1/ Des troubles du sommeil, parfois marqués par une augmentation du sommeil paradoxal dans les heures suivant l’exposition.

2/ Une augmentation des pleurs ou de l’agitation.

3/ Une excitation inhabituelle, ou au contraire une baisse de la consommation de lait, entraînant un risque de moindre prise de poids.


En revanche, il est essentiel de rester mesuré : une consommation occasionnelle et planifiée peut être compatible avec l’allaitement sans compromettre la santé du bébé. Voyons cela de plus près dans le chapitre suivant. 


Pour résumer : 

Une consommation excessive et régulière d’alcool peut provoquer somnolence, troubles du sommeil et impacts sur le développement neurologique chez le bébé. 

Une consommation modérée peut altérer la production et l’éjection du lait. Une consommation occasionnelle, planifiée et mesurée est compatible avec l’allaitement. 


Boire occasionnellement tout en allaitant : conseils pratiques et précautions. 

Vous avez un anniversaire, un mariage ou une soirée entre amis et vous vous demandez si vous pouvez vous autoriser un verre alors que vous allaitez bébé ? C’est possible !

Cependant, avant toute chose, La Leche League attire l’attention sur le fait que les nouveaux-nés sont incapables de métaboliser l’alcool. Il est donc recommandé d’éviter de boire de l’alcool jusqu'à ce que bébé ait 8 semaines minimum.

Après les 8 semaines de bébé, voici les précautions à prendre : 
1/ Consommez votre verre juste après une tétée ou lorsque vous savez que votre bébé dormira plusieurs heures avant de demander à téter de nouveau.
2/ Privilégiez des boissons faiblement alcoolisées. 
3/ Buvez lentement et en mangeant. Un estomac plein permet une évacuation plus rapide de l’alcool. 
4/ Attendez 2h à 3h après avoir consommé un verre pour allaiter bébé (pour une information plus précise, référez-vous au tableau plus haut dans cet article). 

Parmi les solutions les plus prudentes, vous pouvez tirer votre lait au préalable et emporter avec vous un ou deux biberons d’avance pour la soirée. Cela vous permettra de profiter de la soirée sereinement tout en gardant bébé avec vous. 

Si vous le souhaitez, vous pouvez aussi confier bébé à la personne de votre choix pour le faire garder. Cette personne n’aura qu’à lui donner un biberon de lait maternel que vous aurez tiré en amont, pendant que vous profiterez pleinement de votre soirée, avec modération bien sûr. 

Il existe également des tests spécifiques disponibles en pharmacie. Ces bandelettes, faciles à utiliser, permettent de vérifier la présence d’alcool dans le lait maternel. Cependant, elles ne sont pas toujours précises et ne remplacent pas l’attente recommandée. 

Que votre bébé soit à vos côtés ou pas, il est préférable de boire avec modération afin de conserver toute votre vigilance et les bons réflexes à adopter en cas de problème. 


Faut-il tirer et jeter son lait après avoir consommé de l’alcool ?

Lorsqu’on évoque allaitement et alcool, l’idée de "tirer et jeter son lait" après avoir bu revient souvent dans les discussions. Mais est-ce vraiment nécessaire ? Non, cela dépend du délai après lequel vous donner le sein et de la quantité d’alcool bue. 


L’alcool présent dans le lait maternel suit les mêmes fluctuations que dans votre sang. Une fois que votre taux d’alcoolémie diminue, la quantité d’alcool présente dans le lait baisse également, jusqu’à disparaître complètement. 

Tirer et jeter son lait après avoir consommé de l’alcool n’a donc aucune utilité et ne diminue en rien la quantité d’alcool présente, ni la vitesse d’élimination. 

Ce qu’il faut retenir : l’alcool disparaît naturellement avec le temps. Patientez donc 2 à 3 heures après avoir bu un verre d’alcool (se référer au tableau si vous buvez plusieurs verres et selon votre corpulence) avant de pouvoir donner le sein à bébé. Si vous attendez ce laps de temps avant d’allaiter, le lait sera exempt d’alcool, sans qu’il soit nécessaire de le jeter.

Tirez votre lait avant votre événement afin de prévoir des réserves de lait maternel pour nourrir bébé sans vous poser de question. Si vous venez à sauter plusieurs tétées lors de votre soirée, il vous faudra peut-être, là aussi, tirer votre lait pour éviter un engorgement.


Allaitement et addictions : ne pas rester seule face aux défis
L’allaitement est une période de proximité unique entre une mère et son bébé, mais elle peut aussi être ponctuée de défis, notamment lorsqu’il est question d’addictions. Lorsqu’on parle d’addictions, il est important d’élargir la réflexion à d’autres substances comme le tabac, les drogues ou encore certains médicaments. Comprendre les risques et savoir où chercher de l’aide est essentiel pour garantir la santé de la mère et de l’enfant. 

Il nous semble essentiel de rappeler qu’une mère en situation d’addiction n’a pas à affronter ce combat seule. La période post-partum peut être intense sur le plan émotionnel et physique, ce qui peut parfois aggraver ou révéler des comportements addictifs. L’objectif doit être de trouver des solutions pour protéger la santé du bébé tout en accompagnant la mère dans un processus de rétablissement, sans culpabilité aucune. Gardez en tête que lorsque l’on devient maman, on fait ce qu’on peut, pas toujours ce qu’on veut.

Des organismes pour accompagner les mères et les familles 

De nombreux organismes et professionnels sont là pour offrir un soutien personnalisé. En voici quelques-uns qui peuvent accompagner les mères confrontées à une addiction : 

Alcool Info Service : une plateforme dédiée à l’accompagnement des personnes ayant une consommation problématique d’alcool (www.alcool-info-service.fr). 

Tabac Info Service : des outils et des conseils pour arrêter de fumer tout en tenant compte des spécificités de l’allaitement (www.tabac-info-service.fr). 

Drogues Info Service : un accompagnement pour les personnes concernées par des consommations de drogues (www.drogues-info-service.fr). 

La Leche League : un soutien spécifique pour les mères allaitantes, quelle que soit leur situation (www.lllfrance.org). 

En parallèle, les professionnels de santé, comme les sages-femmes, les pédiatres ou les addictologues sont formés pour offrir un accompagnement bienveillant et sans jugement. 
Que vous choisissiez de ne pas boire, de savourer un verre occasionnel ou de tirer votre lait pour nourrir votre bébé pendant qu’il est gardé et danser jusqu’au bout de la nuit, cela reste votre choix en tant que maman. L’essentiel est de rester bienveillante envers vous-même et de faire ce qui vous semble juste, tout en gardant en tête le bien-être de votre bébé. 

Article rédigé en collaboration avec Emma Coutadeur, sage-femme hospitalière.